joe thomson - saan

2025 | JOE THOMSON
SAAN
TORONTO
24 oct - 20 déc, 2025

Vernissage : Vendredi 24 octobre 2025, de 18h à 20h



Joe Thomson, Westinghouse HQ, 2025, huile sur toile, 60 × 48 po.

Mon intérêt pour la peinture autobiographique remonte à longtemps. Créer des images autobiographiques ne provient pas de mon intérêt pour le « réel » mais plutôt de mon désintérêt pour l’ « inventé ». Une vie dans le monde offre déjà plus qu’il n’est possible de considérer pleinement. Jusqu’à récemment, j’ai eu du mal à trouver une approche des images qui ne semblait ni illustrative ni excessivement littérale. Ce corpus d’œuvres est celui où j’ai renoncé aux éléments que j’ai toujours crus nécessaires pour communiquer une expérience, où je me suis autorisé à être indifférent à la narration, permettant, par moments dans le processus, une oscillation entre le sujet et les besoins purement formels de la peinture, qui dictent alors l’action.

Il y a un aspect pratique à mon approche autobiographique : elle me procure un mécanisme d’adaptation face à ma phobie du temps qui passe. Elle me permet de prolonger les expériences à travers leur transcription. Un moment vécu il y a longtemps peut devenir une peinture, ou plusieurs, occupant mon attention aussi longtemps que je le souhaite. C’est une forme de protestation contre la domination linéaire du temps. C’est une mise en scène délibérée de la signification, où le temps devient un espace permettant aux impressions du réel d’être offertes à l’échelle de ma propre évaluation, et non selon les conséquences d’une force invisible et implacable à laquelle nous sommes tout aussi invisibles.

J’intègre du gesso apparent dans de nombreuses images. Il agit comme une forme abrégée du néant, en lien avec la mort et le sens. Le gesso exposé offre la possibilité de ne pas peindre quelque chose, de ne pas remplir la toile. Cela confère à chaque élément inclus la responsabilité de sa nécessité. Il ouvre la voie à l’idée d’une proposition incomplète : l’image n’est pas la représentation d’une idée de la réalité, mais un fragment de représentation. Ce n’est pas un système total en action, c’est une portion de système à qui l’on refuse la possibilité de fonctionner. C’est une action suspendue dans un état terrible : celui d’être privé d’une réaction totale. À quoi les choses ressemblent-elles dans le contexte de la mort, lorsque le néant est la seule et ultime réponse à nos actions ? Que deviennent le but, le sens ou l’ambition lorsque ce n’est plus eux qui concluent, mais que ce rôle est dévolu à quelque chose d’infini et d’insensible ?

Les peintures ont été réalisées entre le 20 août 2024 et le 28 janvier 2025. Certaines représentent des expériences si anciennes que le souvenir n’en est plus qu’une brume colorée. D’autres ont été créées dans les instants mêmes de leur genèse expérimentale, vives et pleinement ressenties, tandis que le pinceau touchait la toile. La tâche presque impossible de la création d’images est d’améliorer le vide.  Ce sont des peintures autobiographiques.

-Joe Thomson